Les dix premières années d'Écrit(s) du Nord

« Écrit(s) du Nord : dixième année d’existence

C’est une histoire que j’ai maintes fois racontée aux amis : c’était en 1995. J’assurais depuis plus d’une année une chronique linguistique pour le supplément commun à une série d’hebdomadaires de la région nord. Un jour, Marguerite, directrice de ces publications, mais aussi éditrice, me propose : « Tes papiers plaisent, comme en témoigne, entre autres, le courrier que nous recevons : veux-tu que nous en fassions un recueil ? » J’aurais pu accepter l’offre qui obéissait à une logique. J’ai pourtant répondu : « Ecoute, Marguerite, si tu as un peu d’argent à perdre, finance-moi plutôt une revue. Il me semble qu’il y a autour de nous du travail à faire, aussi bien pour les auteurs que pour les lecteurs. » Elle a eu la générosité, le panache de me prendre au mot. C’est ainsi qu’Écrit(s) du Nord est né.
Je n’ai pas trouvé tout de suite le titre. Avec Georges Mathieu que je consultais pour ce choix délicat, nous avons passé un après-midi à chercher, sans réussir à nous décider. Il s’agissait d’affirmer une présence en région, sans honte certes, sans régionalisme non plus. Être soi-même et s’ouvrir à autrui. Peu importent, maintenant, les unes auxquelles vous avez échappé : le surlendemain, seul « Écrit(s) du Nord » avait survécu.
Écrit(s) du Nord est donc, d’abord, plutôt qu’une revue, un recueil annuel dont les choix témoignent de nos activités : des rencontres, des animations, des collaborations diverses accompagnent le plus souvent possible la présence dans nos pages.
On trouvait quatre auteurs au sommaire de la première livraison : Jean Bouclon, Georges Mathieu de la Serve, Christian Morel de Sarcus et moi-même. Il ne s’agissait encore que d’un galop d’essai. L’année suivante, déjà, Marie-Claire Bancquart venait, en bonne fée, se pencher sur notre entreprise naissante. Avec le numéro 9 une centaine de voix auront été accueillies, certaines, à plusieurs reprises, en compagnes de route. Enumérer tous les noms peut passer pour fastidieux : ne pas le faire serait injuste. Que les gens pressés sautent donc la liste qui suit : Olivier Apert, Jean-Pierre Balpe, Marie-Claire Bancquart, Keith Barnes, Jean-Michel Béquié, Yves Bichet, François Boddaert, Jean Bouclon, Philippe Caël, Dominique Cagnard, Arno L.Cart, Gérard Cartier, Bernard Chambaz, Arlette Chaumorcel, Marie-Agnès Chavent-Morel, Ivar Ch’Vavar, Sylvestre Clancier, Isabelle Clement, Pascal Commère, Claude Confortès, Chantal Couliou, Jean-Paul Daoust, Rémi Darbre, Christian Degoutte, Ludovic Degroote, Michel Deguy, Jean-Michel Delambre, Pierre Descamps, André Devynck, Pierre Dhainaut, Charles Dobzynski, André Doms, Ariane Dreyfus, Patrick Dubost, Patrice Dufétel, Rémi Duhart, Claude Duneton, Eleusis, Antoine Emaz, Marie Etienne, Clovis Fauquembergue, Rémi Faye, Emilie Frèche, Claire Genoux, Georges Guillain, Eugène Guillevic, Francine Guréghian-Salomé, Georges Hassoméris, Patrice Houzeau, Denise Jardy-Leroux, Vénus Khoury-Ghata, Alain Lacouchie, Gilles Lades, Guy Lafon, Jean L’Anselme, Armelle Leclercq, Jean-Pierre Lemaire, Jean Le Boël, Yves Le Pellec, Sacha Litvinov, Jean-Christophe Macquet, Jean-Paul Maënhaut, Jeanne Maillet, Emmanuelle Marie, Robert Marteau, Georges Mathieu de la Serve, Bernard Mazo, Adrien Montolieu, Christian Morel de Sarcus, Gérard Noiret, Lucien Noullez, Colette Nys-Mazure, Ramiro Oviedo, Eliane Paquet, Florence Pazzotu, André Péragallo, Pascale Pérard, Jeanpyer Poëls, Bernard Pozier, Franco Prete, Lionel Ray, Nadine Ribault, Jean-Daniel Robert, Claude-Henri Rocquet, Bruno Rombi, Georges Rose, Jean Rousselot, Valérie Rouzeau, Annie Saumont, Eric Sénécal, Jacqueline Starer, Michelle Struvier, Lucien Suel, Jean-Pierre Thuillat, Mario Urbanet, Murielle Vanderplancke, Véronique Vassiliou, Jean-Pierre Verheggen, Muriel Verstichel, Alain Wexler. Nous avons invité dans nos derniers numéros Verso, Friches, Action Poétique, Obsidiane, Clarisse.
Cette énumération de patronymes et de titres me paraît révélatrice d’une première série d’aspects de notre démarche : le Nord de la France n’est ni délaissé ni privilégié, voilà pour notre place en région ; les auteurs reconnus y côtoient des écritures nouvelles ou plus ou moins négligées, voilà pour la liberté de choix du comité de lecture et pour son désir d’aider, de promouvoir ; enfin, il n’est guère de tendance de l’offre contemporaine qui ne soit plus ou moins représentée, non parce que nous nous refuserions à choisir, plutôt parce que nous nous voulons témoins de l’activité créatrice et surtout soucieux de la qualité, de la cohérence par rapport au projet, quel qu’il soit.
La deuxième précision concerne le public envisagé : évidemment celui des amateurs de littérature vivante, comme presque toutes les revues ; mais aussi, et c’est assurément une de nos particularités, les élèves des lycées, dans lesquels notre ouvrage reçoit un excellent accueil de la part de certains professeurs qui l’utilisent comme outil d’initiation. Nous espérons contribuer à créer un public plus large et c’est dans cet esprit que nous avons également entrepris nos ateliers d’écriture en milieu scolaire et dans les hôpitaux.
Car Écrit(s) du Nord est aussi une association qui, en partenariat officiel ou non avec la Maison de la Poésie du Nord/Pas-de Calais*, organise toute une série de manifestations, dont Poètes en campagne ou le Prix des Trouvères, notamment. Lorsque P.P.P., premier éditeur, s’est mis en sommeil, Écrit(s) du Nord est même devenu un temps éditeur à son tour, avant que les éditions Henry ne prennent le relais.
Enfin, le recueil annuel vaut aussi comme objet, du moins le souhaitons-nous. Un beau papier, une mise en page soignée, la collaboration d’un plasticien. Se sont ainsi succédé René Charles, Rémi Darbre (deux fois), François Da Ros, Jean-Michel Delambre, Martine Rassineux, Anne Ar Moal, Louis Tartarin, Béa Jomelli-Robert. Le numéro dix accueillera Nathalie Grall. Nous avons également le projet d’y présenter un grand nombre de textes sous forme autographe, d’y donner à voir le travail de la main. Ce sera notre façon de fêter notre décennie : dans les livres, la vie, toujours !
Voilà bientôt deux ans déjà, dans la Revue des revues d’Aujourd’hui POÈME, Bernard Mazo comptait Écrit(s) du Nord parmi la vingtaine de titres les plus en vue, à côté des prestigieuses Europe, Action poétique, Po&sie, La sape, Autre Sud, Décharge et autres. Hommage, sans doute excessif pour notre structure, encore bien modeste. Mais encouragement, aussi. Nous n’avons pas la prétention d’inventer, juste celle de servir. Nos statuts, dans leur article deux, nous assignent pour vocation de promouvoir et de faciliter la création littéraire et artistique. Nous tâchons de nous en donner les moyens.

Jean Le Boël »

*Note de 2023 : Elle est devenue depuis Maison de la Poésie des Hauts de France. Son siège est toujours dans ses locaux historiques de Beuvry.